ARAGON - PREVERT : LE HOULME

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ARAGON - PREVERT : LE HOULME

49 302 | Lettre de Loïk à sa famille

Loïk Gwilherm, accusé d’un crime est condamné à 15 ans de bagne sur la station-bagne XV en orbite autour de la planète Syringa.

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Le 15 décembre 2124
Très chère maman, Maelwenn, Ma tendre Violaine,

Je sais que je n’aurais jamais la possibilité de vous faire parvenir mes lettres, mais j’ai un besoin irrépressible d’écrire. De laisser couler tout ce que j’ai dans le ventre, sur le cœur, dans les tripes. Comme quelque chose qui me raccroche à la vie, la vraie. La mienne est définitivement entre parenthèses, et garder un lien avec vous me prouve que je ne suis pas encore tout à fait mort. Qu’il subsiste un espoir, une lumière...

Après un an, la sentence hurlée par le juge résonne en moi à chaque instant... COUPABLE ! TRAVAUX Forcés SUR SYRINGA ! Mes yeux s’embuent alors que la colère gronde dans ma gorge. J’en frémis encore. L’horreur de la condamnation pour un acte que je n’ai pas commis. Une condamnation sans appel ni échéance : ceux qui partent ne reviennent jamais, alors à quoi bon condamner à cinq, dix, vingt ans ou perpétuité... Je vous revois encore toutes les deux sur les bancs de ce tribunal austère et inhumain.

Maman s’est effondrée, et toi, ma sœur, ton visage était baigné de larmes ininterrompues. J’aurais tellement aimé revoir Violaine une dernière fois...

Le soir même, j’ai été enfermé dans le vaisseau qui me conduit sur la station-bagne XV. Ce que je vis dans ce vaisseau qui rejoint l’atmosphère de Syringa n’est rien à côté de ce qui me reste à vivre, me dit-on. Maelwenn... je te l’avoue, à toi, ma soeur,qui m’as toujours compris et soutenu, oui, j’ai pensé au suicide. [...] Mais non, la volonté subsiste encore. Si je me suicide, je montre que je suis coupable.

Bon sang ! Je suis innocent ! Aujourd’hui, à bientôt vingt ans, ma vie est déjà brisée. Alors, je pense à cet enfant qui est le mien et que je n’ai jamais vu... que je ne verrai jamais. Et ma pauvre Violaine, fille-mère qui doit assumer seule ce petit être que nous avons fait à deux.

Je dois vous laisser, nous arrivons au terme de notre voyage spatial. Je vais bientôt découvrir ma nouvelle prison. Va-t-elle être aussi ignoble que ce vaisseau sur lequel nous sommes entassés depuis presque un an ?

Affectueusement,

votre Loïk.

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