ARAGON - PREVERT : LE HOULME

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ARAGON - PREVERT : LE HOULME

49 302 | Première journée de travail sur Syringa

Dès le lendemain de son arrivée à la station-bagne XV, Loïk doit descendre sur la planète Syringa avec les autres condamnés pour faire son travail.

Retour Sommaire Le réveil fut brutal. Un bruit assourdissant se propageait dans le couloir avec, en fond sonore, une musique puissante ressemblant à celle d’une corne de brume. D’un coup, des lumières violents inondèrent la pièce à l’odeur humaine fétide. Il n’était que quatre heures du matin. Je me sentais faible : la tête me tournait alors que mon estomac protestait.

  • Debout, tas de fainéants ! Debout et en rang ! Distribution de nourriture !

À peine ces mots lancés, une marée humaine se précipita vers la porte où campait un garde près d’un chariot croulant sous de petits paquets translucides. Je me levai, les membres endoloris, pour aller chercher ce qui me tiendrait lieu de carburant organique. Les doutes concernant l’apport calorifique de ces petites gélules que je distinguais dans les mains de mes compagnons envahirent aussi bien mon esprit que mon corps, affaibli par le manque de nourriture suffisante. Le juste nécessaire nous était fourni pour ne pas mourir de faim : nous maintenir en vie, mais faibles.

Le garde me tendit une pochette souple dans laquelle un liquide jaunâtre réchauffa ma main gauche. De la droite, je m’emparai de deux gélules : l’une grise, l’autre rose.

  • Votre repas pour la journée. Pour la boisson, gardez-la contre votre corps pour la maintenir à une température constante. En refroidissant, elle devient toxique.

Désorienté, je constatais que le régime alimentaire serait encore plus rude que sur le vaisseau.

  • Maintenant, je vais faire l’appel. Le premier groupe me suivra dans les navettes de transport.

Mon matricule était dans la liste. Tout en glissant la pochette entre mon ventre et la ceinture de mon pantalon, j’aspirai une petite goulée de liquide par le tuyau qui servait de paille. Un goût amer et sucré se répandit sur mes muqueuses, tandis que la boisson plongeait dans mon estomac creux.

En me dirigeant vers le groupe nommé, je contemplai les deux gélules et me demandai laquelle je devais avaler en premier. Un condamné qui présentait une cicatrice sur la joue droite me donna un coup de coude pour attirer mon attention :

  • Te pose pas de questions, avale ! Que se soit l’une ou l’autre, aucune ne te rassasiera.

Je portai la gélule grise à mes lèvres sèches et l’avalai d’un coup. Elle descendit rapidement pour amerrir dans le liquide récemment ingurgité. Son action fut immédiate : elle gonfla, me donnant la sensation d’avoir le ventre plein.

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