Circé la magicienne
Éclaireurs
La flotte d'Ulysse aborde ensuite l'île des Lestrygons : ces géants cannibales font un horrible carnage ! Ulysse ne peut sauver qu'un seul de ses navires. Aussi, lors de l'escale suivante, Ulysse est-il devenu très méfiant. Il envoie une partie de ses hommes en reconnaissance dans l'île pendant que les autres gardent le bateau.
Les éclaireurs marchent longtemps avant d'apercevoir un palais au fond d'un vallon. À la vue des fauves qui le gardent, ils sont pris de frayeur et tirent leur épée. Mais, curieusement, au lieu de bondir sur les hommes, les lions et les loups se frottent à eux pour obtenir des caresses. Une femme divine apparaît alors à la porte du palais :
« Je suis Circé, dit-elle. Entrez ! Vous devez avoir soif. »
Sa voix est charmante, sa beauté envoûtante ! Les hommes la suivent. Elle les invite à s'asseoir puis leur verse du vin mêlé de miel qui contient un philtre d'oubli. Ils boivent avec plaisir, se mettent à chanter et à rire. Soudain, d'un coup de baguette, elle les métamorphose en cochons...

Hermès et le contre-poison
Inquiet de ne pas voir revenir les éclaireurs, Ulysse s'enfonce à son tour dans l'île. Il approche du palais quand surgit devant lui un ne homme portant une baguette d'or. C'est Hermès, le dieu rusé :
« Où vas-tu malheureux ? lui dit-il. Ne sais-tu pas qu'ici règne Circé, la déesse magicienne ? Pour garder les hommes auprès d'elle, elle les transforme en bêtes. Elle a changé tes compagnons en porcs et te changera à ton tour en cochon. Moi seul peux te sauver. Prends cette herbe de vie qui te protégera contre les sortilèges de Circé. »
Ulysse avale le contrepoison puis se rend au palais de la magicienne. L'air de rien, il boit le breuvage que Circé lui sert dans une coupe d'or. Mais quand elle le frappe de sa baguette, au lieu de se transformer en cochon, Ulysse tire son épée et bondit sur la déesse comme pour la tuer. Aussitôt, elle comprend :
« C'est donc toi Ulysse, celui dont Hermès m'avait annoncé la venue, toi dont il m'avait dit que tu résisterais à mes enchantements... Reste dans mon palais et nous vivrons d'amour ! »
« Circé, comment oses-tu me parler d'amour alors que tu as changé mes compagnons en porcs ! Délivre-les d'abord et jure de ne plus faire usage de tes maléfices! »
Circé jure par le serment des dieux. Puis, elle entraîne Ulysse dans la porcherie où il découvre avec stupeur ses compagnons : transformés en porcs, ils mangent des glands. Circé enduit le corps de chacun d'un onguent magique : aussitôt, les cochons redeviennent des hommes plus jeunes
et plus beaux qu'avant !
Thirésias, le devin
Une fois la méfiance tombée, tous les compagnons d'Ulysse viennent goûter aux délices du palais de Circé tandis que l'enchanteresse séduit le bel Ulysse. Une année s'écoule dans ce lieu idyllique. Un beau jour, Ulysse décide cependant de repartir..
Circé lui indique le chemin à suivre et la manière d'éviter les périls. Sur les conseils de Circé, Ulysse se rend d'abord aux confins du pays des Morts afin d'interroger le devin Tirésias sur son destin. Là, pour convoquer les morts, il sacrifie un bélier. Le héros sent la peur le glacer à la vue des ombres qui viennent s'abreuver au sang de l'animal sacrifié afin de reprendre une parcelle de vie.Il voit ainsi ses compagnons de la guerre de Troie et sa mère, morte de chagrin après son départ. Le devin Tirésias arrive enfin.
« Ulysse, dit-il, tu veux savoir la vérité ? Poséidon te hait parce que tu as aveuglé son fils Polyphème. Il te persécutera aussi longtemps qu'il le pourra. Mais si tu surmontes les épreuves, tu finiras par rentrer à Ithaque. »
Le pays des morts
L'ombre de la mère d'Ulysse parle à son tour. « Mon fils, lui dit-elle d'une voix douce, sache que ta femme Pénélope te croit toujours vivant et qu'elle pleure chaque soir ton absence... Mais ne tarde pas trop : elle a de plus en plus de mal à écarter les prétendants qui veulent l'épouser et prendre ta place. »
Tirésias donne un dernier avertissement à Ulysse : « Si tu veux que tes hommes reviennent vivants, empêche-les de toucher aux vaches sacrées d'Aélios... je ne peux t'en dire plus, mes forces m'échappent. »
Toutes les ombres s'évanouissent alors, happées par le monde des Morts.